Wiki des méthodes de biologie moléculaire et cellulaire


Glossaire collaboratif des méthodes expérimentales de biologie moléculaire et cellulaire. Ce glossaire est réalisé par les étudiants du module "Méthodes expérimentales de biologie moléculaire et cellulaire" sous la supervision de l'équipe de Génétique Animale.

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A

Analyse du potentiel membranaire des bactéries : utilisation du colorant DiSC3(5)

par Alize MOUCHARD, jeudi 25 mars 2021, 12:12
 

I)               Objectifs

        La membrane bactérienne est une cible majeure de nombreux composés antimicrobiens. Ainsi, des tests de perméabilité membranaire in vivo (c’est-à-dire sur des bactéries vivantes) sont essentiels pour étudier le mode d'action de tels composés. L’analyse de potentiel membranaire chez les bactéries permet de révéler la formation de pores dans la membrane, une augmentation de la perméabilité ionique de la membrane, ou une action sur un transporteur d'ions (Brogden, 2005). L’un des colorants bien établi pour de telles mesures est l’iodure de 3,3′-dipropylthiadicarbocyanine (DiSC3(5)) auquel nous allons nous intéresser (te Winkel et al., 2016).

II)            Principe

        Le DiSC3(5) est un colorant capable de s’insérer dans les membranes hyperpolarisées. Il est libéré lors de la dépolarisation conduisant à une augmentation du signal fluorescent dans les dosages spectroscopiques. Ce colorant peut également être utilisé en microscopie à fluorescence afin d’évaluer l'hétérogénéité dans la population cellulaire (te Winkel et al., 2016).

III)         Mode opératoire

a)     Microscopie à fluorescence

        Afin de réaliser l’analyse de potentiel membranaire avec le DiSC3(5), les cellules doivent être cultivées dans du LB (lysogeny broth) sous agitation jusqu’à une phase de croissance exponentielle. Puis elles doivent être incubées 5 minutes avec le colorant à 2 µM (à 0,5-1 % de Diméthylsulfoxyde (DMSO), ce qui permet une solubilité optimale) et les agents antimicrobiens testés (avec un contrôle positif), avant d’être observées sous microscope à fluorescence. Pour cela, la suspension cellulaire est immobilisée sur une lame multipoint recouverte d’une fine couche d’agarose à 1,2 %. 0,5 µl de suspension cellulaire sont donc prélevés dans la culture et déposés sur la lame préparée, puis recouverts par une lamelle après séchage. La goutte de milieu appliquée fournit suffisamment de nutriments pour maintenir les cellules sous tension, mais l'accès à l’O2 sous la lamelle est limité, entraînant une perte graduelle du potentiel membranaire. Pour cette raison, il est important de réaliser l’observation microscopique dans les 10 minutes suivant le dépôt de la lamelle (te Winkel et al., 2016). La quantification de la fluorescence cellulaire peut se faire de manière semi-automatisée grâce au logiciel ImageJ (Vischer et al., 2015).

b)    Dosage spectrométrique

        Les mesures fluorométriques du potentiel de membrane peuvent être réalisées sur des plaques de microtitration en polystyrène noir et compatibles avec un fluoromètre à température régulée, capable d'excitation et de détection aux longueurs d'onde requises. Les mesures sont effectuées directement dans du milieu LB supplémenté avec 0,5 mg / ml de BSA (Bovine Serum Albumin), permettant de réduire l'absorption du DiSC3(5) sur les surfaces en polystyrène.

        Une densité cellulaire et une concentration de colorants optimales se sont avérées être les paramètres clés déterminant le rapport signal sur bruit dans ce test. C’est pourquoi ces paramètres doivent d’abord être déterminés lors de l'adaptation de ce test à de nouvelles espèces bactériennes ou milieux.

        135 µl de cellules diluées sont transférées sur la plaque de microtitration et la fluorescence est suivie pendant 2 à 3 minutes, afin d'obtenir des valeurs de fluorescence du milieu et du fond cellulaire. Après avoir obtenu une ligne de base, le DiSC3(5) dissous dans du DMSO est ajouté à chaque puits à une concentration finale de 1 μM DiSC3(5) et 1 % de DMSO. La désactivation de la fluorescence est mesurée jusqu'à ce qu'une intensité de signal stable soit obtenue, suivie de l'addition des composés d'intérêt, sans oublier le témoin positif approprié.

        Si la dépolarisation est lente, la croissance cellulaire s’avère entraîner un changement progressif des valeurs de fluorescence observées avec l'échantillon témoin non traité. Une inhibition de la croissance cellulaire pour supprimer ce décalage et entraîner des niveaux de fluorescence stables est donc nécessaire.

        Afin de maintenir une aération appropriée au moment des mesures, et donc maintenir un niveau de fluorescence stable, les plaques de microtitration doivent être soumises à une agitation rigoureuse entre chaque point de mesure (te Winkel et al., 2016).

IV)         Présentation des résultats

a)     Microscopie à fluorescence


Figure 1 : Bacillus subtilis observé en contraste de phase (panneau de gauche), exprimant la GFP-MinD (panneau du milieu) et colorées au DiSC3(5) (panneau de droite) en l'absence et en présence de gramicidine (5 μM), connu pour engendrer une dépolarisation de la membrane (te Winkel et al., 2016).

b)    Dosage spectrométrique


Figure 2 : Changements d'intensité de fluorescence de DiSC 3 (5) dans une suspension cellulaire. Les points temporels de l'ajout de colorant et de gramicidine sont mis en évidence par des flèches. Le graphique représente la moyenne et l'écart type de trois répliques techniques (te Winkel et al., 2016).

V)            Interprétation des résultats

a)     Microscopie à fluorescence

        La gramicidine étant connue pour engendrer une dépolarisation membranaire chez B. subtilis, la figure 1 montre une forte diminution de la fluorescence DiSC3(5) et une délocalisation de MinD lors de la dépolarisation. Ainsi, lorsque l’agent anti-bactérien étudié a un effet sur la dépolarisation membranaire, la fluorescence devient moins importante (te Winkel et al., 2016).

b)    Dosage spectrométrique

        La figure 2 montre une forte extinction de la fluorescence DiSC3(5) lors de l'accumulation dans les cellules, et une augmentation de la fluorescence dans le milieu lors de la dépolarisation de la membrane. Le solvant utilisé pour solubiliser la gramicidine (DMSO) n'a aucune influence sur les niveaux d'intensité de fluorescence. Il est également possible de mesurer le niveau de dépolarisation membranaire grâce à la réalisation d’une gamme d’étalonnage réalisée grâce à différentes concentrations en K+ dans le milieu (te Winkel et al., 2016).

VI)         Intérêts et limites

        Le colorant DiSC3(5) est donc un colorant permettant une analyse précise du potentiel membranaire par deux méthodes : spectroscopique et microscopique. En microscopie, il s’agit d’un colorant rouge lointain, et donc compatible avec la GFP et la plupart des autres colorants couramment utilisés en biologie cellulaire bactérienne.

        Cependant, une exposition prolongée au DiSC3(5) est toxique pour les cellules bactériennes, ce qui empêche son utilisation en microscopie timelapse (te Winkel et al., 2016).

VII)      Références bibliographiques

Brogden KA (2005). Antimicrobial peptides: pore formers or metabolic inhibitors in bacteria? Nat Rev Microbiol 3: 238–250

te Winkel JD, Gray DA, Seistrup KH, Hamoen LW, Strahl H (2016). Analysis of Antimicrobial-Triggered Membrane Depolarization Using Voltage Sensitive Dyes. Front Cell Dev Biol. doi:10.3389/fcell.2016.00029

Vischer NOE, Verheul J, Postma M, van den Berg van Saparoea B, Galli E, Natale P, Gerdes K, Luirink J, Vollmer W, Vicente M, et al (2015). Cell age dependent concentration of Escherichia coli divisome proteins analyzed with ImageJ and ObjectJ. Front Microbiol. doi: 10.3389/fmicb.2015.00586



Assay of Transposase Accessible Chromatin sequencing (ATAC-seq)

par Quitterie MOREL DE VILLIERS, lundi 11 avril 2022, 12:20
 

Assay of Transposase Accessible Chromatin sequencing (ATAC-seq)


Objectifs

            La méthode de «Assay for Transposase-Accessible Chromatin using sequencing» (ATAC-seq) est utilisée afin de cartographier l’accessibilité de la chromatine, c’est à dire de détecter les régions ouvertes au sein du génome, au niveau d'une seule cellule. Cela permet notamment d’identifier la position des nucléosomes au sein des régions régulatrices et de mieux comprendre la fixation détaillée des facteurs de transcription dans ces régions (Buenrostro et al., 2015).

Principe 

        La méthode consiste dans un premier temps à lyser les cellules afin d'accéder au contenu de leurs noyaux. L’euchromatine (part non condensée de l’ADN) est ensuite fragmentée par digestion enzymatique, via une transposase de synthèse hyperactive : la Tn5. Cette dernière, de manière simultanée, fragmente l'ADN accessible et tague ces framents (tagmentation). Une fois purifiés, ces fragments peuvent alors être amplifiés et séquencés (Stevant, 2019). 

Mode opératoire

        D’abord, entre 500 et 50 000 cellules cultivées sont récoltées, puis préparées par une succession de trois centrifugations intercalées d’un rinçage et d’une lyse. Le culot obtenu contient l’ADN purifié. Ce dernier est alors incubé 30 min à 37°C en présence un mélange réactionnel de transposition contenant la transposase Tn5, à l’origine de la tagmentation.  Le tout est alors purifié et peut être stocké à -20°C si nécessaire.

        Une fois amplifiés par PCR, les fragments sont séquencés afin d’être identifiés, permettant de savoir quels fragments d’ADN sont sous forme d’hétérochromatine ou d’euchromatine (Buenrostro et al., 2015). 


Figure 1 : (A) Schéma de la préparation de la bibliothèque. (B) La transposition entraîne la fragmentation de l'ADN. Avant l'amplification, les adaptateurs doivent être complétés par une étape d'extension à 72°C. Au cours de la PCR suivante, une séquence supplémentaire est incorporée dans les adaptateurs, qui comprennent des extrémités de séquençage communes et un code-barres de séquençage (Buesnrostro et al., 2015).

Présentation des résultats 

        Les données obtenues correspondent à des pics de “reads” (fragments de séquences), dans les régions ouvertes de l’ADN. Il est en effet possible de traiter les données avec un algorithme d'analyse standard tel que proposé par ENCODE project (https://www.encodeproject.org/atac-seq/). Ce dernier s’assure de la qualité du séquençage, supprime les adaptateurs d’amplification des fragments de séquence et analyse les correspondances avec un génome de référence. Les correspondances fréquentes sont matérialisées par des pics (Stevant, 2019). 


Figure 2 : Identification d’un enhancer dans le tissu primodium de l’oeil chez la drosophile avec l’ATAC-seq (Davie et al., 2015)

Interprétation des résultats 

Pré-analyse

Un contrôle de la qualité est effectué, une étape habituelle avec les méthodes de séquençage haut-débit. Un alignement avec les génomes connus, puis une vérification de cet alignement sont ensuite effectués. 

Analyse de base 

La deuxième grande étape de l'analyse des données ATAC-seq consiste à identifier les régions accessibles (également appelées pics de chromatine ouverte) et constitue la base d'une analyse avancée.

Analyse avancée 

Cette dernière étape consiste en l’analyse différentielle et annotation des pics, l’analyse de l’enrichissement des motifs, l’analyse de l’empreinte, pour conduire à l’analyse de la position des nucléosomes. (Baek et Lee, 2020)

 

Figure 3 :  Feuille de route d’une analyse typique de données ATAC-seq (Yan et al., 2020)

Intérêts et limites 

Un intérêt de cette méthode est le faible nombre de cellules nécessaire à la mise en place de la méthode par rapport à d’autres méthodes telles que MNase-seq, ChIP-seq ou DNase-seq (10 à 100 fois moins). Le protocole nécessite 3 h de travail pour obtenir des résultats (contre 4 jours pour les autres). De plus, la PCR peut être réalisée plus tard à partir des échantillons congelés. 

Un problème lié à cette méthode est l’analyse informatique des données, qui peut s’avérer fastidieuse. De plus, il y a de nombreux éléments potentiellement fonctionnels dans les régions accessibles du génome. Cela complexifie l’interprétation des données si ces éléments sont mal connus (Höllbacher et al., 2020).

Références bibliographiques 

Buenrostro, J.D., Wu, B., Chang, H.Y., and Greenleaf, W.J. (2015). ATAC-seq: A Method for Assaying Chromatin Accessibility Genome-Wide. Curr. Protoc. Mol. Biol. 109:21.29.1-21.29.9.

Baek S, Lee I (2020) Single-cell ATAC sequencing analysis: From data preprocessing to hypothesis generation. Computational and Structural Biotechnology Journal 18: 1429–1439

Davie K, Jacobs J, Atkins M, Potier D, Christiaens V, Halder G, Aerts S. (2015) Discovery of transcription factors and regulatory regions driving in vivo tumor development by ATAC-seq and FAIRE-seq open chromatin profiling. PLoS Genetics. 4,5

Höllbacher B, Balázs K, Heinig M, Uhlenhaut NH (2020) Seq-ing answers: Current data integration approaches to uncover mechanisms of transcriptional regulation. Computational and Structural Biotechnology Journal 18: 1330–1341

Stevant I. (2019) Traquer les régions ouvertes de l'ADN avec l'ATAC-seq. Bioinfo-fr, https://bioinfo-fr.net/traquer-les-regions-ouvertes-de-ladn-avec-latac-seq, consulté le 19/03/2022 

Yan, F., Powell, D.R., Curtis, D.J. et al. (2020) From reads to insight: a hitchhiker’s guide to ATAC-seq data analysis. Genome Biol 21, 22

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B

BICINCHONIQUE ACID ASSAY (BCA)

par Coline MAHE, mardi 24 avril 2018, 10:52
 

bicinchonique Acid Assay (BCA)

 

I - Objectifs

La quantification protéique par l’acide bicinchonique (ou BC Assay) est une méthode qui permet de déterminer la concentration en protéines d’un échantillon par colorimétrie. L’équation de la droite donnant l’absorbance en fonction de la concentration pour chaque standard permet de calculer la concentration d’un échantillon à partir de son absorbance.

Cette technique est notamment utilisée avant la réalisation d’un western blot : les échantillons sont chargés de sorte qu’ils aient la même concentration. Une BC Assay est donc réalisée afin de diluer convenablement la solution protéique à l’aide des concentrations calculées à partir des données d’absorbance.

 

II - Principe

La méthode repose sur le fait que l’absorbance est directement proportionnelle à la concentration en protéines d’un échantillon. Or, en milieu alcalin, les ions Cu2+ sont réduits en Cu+ par les protéines de l’échantillon. Puis, l’ajout de l’acide bicinchonique permet la formation d’un complexe spécifique [Acide Bicinchonique/Cu+] qui prend une teinte violette dont le maximum d’absorption se trouve à 562 nm (Walker, 1994). 

Figure 1 : Réactions chimique réalisée au cours du dosage colorimétrique entre protéines, ions cuivriques et BCA (Thermo Scientific, 2009)


III - Mode opératoire

Tout d’abord, une gamme de dilution d’Albumine de Sérum bovin (ABS) (initialement concentré à 0.5 mg/ml dans de l’eau) est réalisée.

Les standards sont les suivants :

  • Std 1 = 4 μl BSA + 16 μl miliQ H20
  • Std 2 = 8 μl BSA + 12 μl miliQ H20
  • Std 3 = 12 μl BSA + 8 μl emiliO. H20
  • Std 4: 16 μl BSA+ 4 μl miliO. H20
  • Std 5 = 20 μl BSA
  • Blanc = 20 μl miliQ H2O

Les différents échantillons sont déposés dans chaque puits en prenant soin de retirer les cônes entre chaque dépôt. Le facteur de dilution a été déterminé par une BCA dans laquelle il y aurait une gamme de dilution pour l’ABS et une autre pour l’échantillon en question : le facteur à prendre sera alors celui dont la couleur se situe dans la gamme de couleurs de l’ABS dans l’eau. Chaque échantillon est placé en duplicata dans les puits en prenant soin de les vortexer au préalable et de changer de cône. Une fois tous les échantillons chargés, la solution BCA est préparée en combinant la solution claire (BCA Reagent A à 4.9 ml) et la bleue (BCA reagent B à 100 μl). 200 μl de cette solution colorée sont déposés dans chacun des puits. La plaque est incubée à 37°C pendant 30 minutes, puis passée au spectrophotomètre. L’absorbance de chaque valeur permettra de déterminer la concentration de chaque échantillon à partir de l’équation de la droite d’étalonnage réalisée grâce aux standards.


IV - Présentation des résultats

Le lecteur de plaque (ou spectrophotomètre) donne des valeurs d’absorbance pour chaque puits. La valeur d’absorbance du standard 6 est soustraite (information background) à toutes les autres, puis la moyenne de chaque dépôt déposé en double est calculée. Ensuite, une droite est tracée en prenant en paramètre l’absorbance de chaque standard en ordonnée et leur concentration en abscisse. Puis, via l’équation de la droite, la concentration de chaque échantillon est obtenue ; une moyenne sera faite entre les duplicatas. Il ne faut évidemment pas oublier de prendre en compte la dilution effectuée au cours de l’expérience dans ses calculs.

 

Figure 2 : Présentation d’un résultat de BCA avec l’exemple de l’albumine de bovins (Andrew, 2018, résultats non publiés)

 

NB : Les résultats ne seront valables que dans la mesure où :

  • Le coefficient de corrélation de la droite d’étalonnage R² est supérieur à 0.90,
  • La différence d’absorbance entre les duplicatas d’un même échantillon est inférieure ou égale à 10%.

 

V - Intérêts et limites

Les avantages sont la rapidité et la simplicité, puisqu’elle peut être faite en une étape (30 minutes pour déposer les échantillons et 30 minutes d’incubation à 37°C), contrairement à la méthode de Lowry (autre méthode de quantification colorimétrique), qui elle en nécessite deux (Lowry et al., 1951 et Smith et al., 1985). Cependant, des interférences peuvent venir perturber les données d’absorbance de la solution : des substances réduisant le cuivre, des acides aminés et des réactifs chélatant le cuivre (production d’un couleur, donc manque de précision de la protéine utilisée). Néanmoins, la BC Assay serait plus tolérante face à la présence de composés qui seraient susceptibles de brouiller les résultats, contrairement à la méthode Lowry (Thermo Scientific, 2009).

En revanche, la fiabilité de cette méthode dépend fortement de la précision de l’utilisateur lorsqu’il réalise les dépôts et peut par conséquent manquer de précision selon la qualité des dépôts. Étant donné les réactifs utilisés, elle reste aussi coûteuse.

 

VI - Références bibliographiques

Lowry OH, Rosebrough NJ, Farr AL, and Randall RJ. (1951). Protein measurement with the Folin phenol reagent. J Biol Chem. 193(1):265-75.

Smith PK, Krohn RI, Hermanson GT, Mallia AK, Gartner FH, Provenzano MD, Fujimoto EK, Goeke NM, Olson BJ, and Klenk DC (1985). Measurement of protein using bicinchoninic acid, Anal.Biochem. 150 (1), 76-85

Thermo Scientific Pierce Protein Assay Technical Handbook, (2010), p.15-20

Walker J, (1994) The Bicinchoninic Acid (BCA) Assay for Protein Quantitation. Methods Mol Biol. 32,5-8.


C

CANARY

par Mado BARTHOD, jeudi 16 mars 2023, 12:46
 

CANARY : Cellular Analysis and Notification of Antigen Risks and Yields

I. Objectifs 

La technologie de biocapteur cellulaire CANARY (Cellular Analysis and Notification of Antigen Risks and Yields) permet d’identifier des pathogènes, protéines toxiques solubles ainsi que des séquences d’ARN/ADN dans des échantillons à la fois solides et liquides (nourriture, tissus végétaux et humains, échantillons médicamenteux, ...) (Rider et al., 2003 ; Tam et al., 2018).


II. Principe

Des lymphocytes B, un type de globules blancs, ont été génétiquement modifiés afin de se lier spécifiquement à des agents pathogènes cibles. Ces cellules expriment désormais : 

- Des anticorps liés à la membrane, spécifiques des antigènes d'intérêt.

- L’aequorine cytosolique, une protéine bioluminescente. Lors de la formation du complexe anticorps/antigène, des modifications membranaires des lymphocytes B entraînent une augmentation de calcium intracellulaire. L’aequorine cytosolique, sensible au calcium, émet alors des photons (Figure 1) (Rider et al., 2003).



 Figure 1 : Cascade d'induction créée par la liaison des lymphocytes B modifiées à l’antigène d'intérêt conduisant à l’émission de photons. 


Les applications des tests CANARY sont multiples : génotypage de pathogènes, tests de virulence, dépistages de résistance aux antibiotiques, détection d’agents pathogènes aux points d'entrée, contrôle des denrées périssables, …


III. Mode opératoire 

Des cellules B spécifiques du pathogène à identifier sont préparées, puis ajoutées à l’échantillon d’intérêt dans un tube transparent. Grâce à une centrifugation rapide, les cellules sont culottées au fond du tube : cela permet qu’un grand nombre de lymphocytes B entre en contact physique avec l'antigène en peu de temps. Cela améliore considérablement la sensibilité et la vitesse de la manipulation. La luminescence du tube est mesurée grâce à un photodétecteur équipé d’un capteur de comptage de photons (Rider et al., 2003 ; Tam et al., 2018).


IV. Intérêts et limites 

 Cette méthode est hautement spécifique, à forte sensibilité, à prix abordable et surtout très rapide (les tests durent entre 1 et 5 min, Figure 2). La méthode CANARY concurrence donc la PCR qui dure 30 min et qui renvoie beaucoup de faux négatifs.


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Figure 2 : La réponse rapide de CANARY permet de couvrir de manière unique la zone de détection et de protection d'un rejet d'aérosol.


En général, la limite de détection (LOD) de la méthode CANARY est de 10 à 10 000 unités formant colonie (ufc)/g ou mL (Tableau 1). Cependant, pour les agents pathogènes trop petits pour être rapidement sédimentés dans une microcentrifugeuse (virus entre autres), la LOD est de l'ordre de 50 000 unités formant plage (ufp) (Rider et al., 2003). 


Tableau 1 : limite de détection (LOD) du test CANARY pour des matrices complexes

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V. Présentation des résultats

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Figure 3 : Courbe de dose-réponse obtenue via la méthode CANARY pour Yersinia pestis inactivé


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Figure 4 : Courbe de dose-réponse obtenue via la méthode CANARY pour l'Holotoxine BoNT/A. Le tableau adjacent montre la lecture générée à partir du test de biocapteur CANARY. 


Le résultat se présente sous la forme d’une courbe représentant la luminescence de l’échantillon (RLU : unité de lumière relative) au cours du temps lors de sa centrifugation (Rider et al., 2003 ; Tam et al., 2018). Les variations de luminescence sont générées par le fait qu’il y a un plus grand nombre de lymphocytes B qui entre en contact avec les agents pathogènes au début de la centrifugation qu’à la fin. 


VI. Interprétation des résultats

Les résultats obtenus ci-dessus montrent que les cellules répondent très rapidement sur une large gamme dynamique de concentrations d'agents. Ainsi, plus il y a d’agents pathogènes présents dans l’échantillon, plus il y aura de lymphocytes modifiés qui se fixeront à eux, et donc plus la luminescence de l’échantillon sera élevée. 

En outre, la spécificité du système est démontrée par l'absence de réactivité croisée avec d'autres agents pathogènes.

Ainsi, les courbes témoins associées aux différents agents pathogènes existants permettent à la fois de mesurer la quantité d’agents pathogènes présents dans l’échantillon, mais aussi d’attribuer un nom à l’agent analysé, grâce à la spécificité des lymphocytes B modifiés introduits dans l’échantillon. 


VII. Références bibliographiques 

Rider TH, Petrovick MS, Nargi FE, Harper JD, Schwoebel ED, Mathews RH, Blanchard DJ, Bortolin LT, Young AM, Chen J, et al (2003) A B Cell-Based Sensor for Rapid Identification of Pathogens. Science. 301: 213–215

Tam C, Flannery A, Cheng L (2018) A Rapid, Sensitive, and Portable Biosensor Assay for the Detection of Botulinum Neurotoxin Serotype A in Complex Food Matrices. Toxins. 10: 476



Chromatin Immunoprecipitation (ChIP)

par Lucie LECUYER, mercredi 1 avril 2015, 18:18
 

Chromatin Immunoprecipitation (ChIP)

 

1. Objectifs

 

L’immunoprécipitation de la chromatine est une méthode qui permet l’étude des protéines interagissant avec la molécule d’ADN. On obtient une représentation des interactions protéine–ADN qui ont lieu dans le noyau de la cellule vivante ou dans les tissus (in vivo).

Elle est en général utilisée pour localiser des sites de fixation de facteurs de transcription, des sites associés avec des protéines de la chromatine, ou encore avec des histones possédant des modifications post-traductionnelles spécifiques.

 

2. Principe

 

Cette technologie se base d’abord sur la préparation de complexes protéine/ADN par action du formaldéhyde sur les cellules ou tissus puis sur l’immunoprécipitation de la chromatine en utilisant des anticorps spécifiques d’une protéine d’intérêt (présumée liée à l’ADN).

 

3. Mode opératoire

 

 -          La première étape est la formation de liaisons covalentes in vivo entre les protéines et l’ADN. En général, du formaldéhyde est ajouté sur des cellules, mais l’utilisation des UV ou de bleu de méthylène est aussi pratiquée.

-          Les cellules ainsi traitées sont ensuite lysées par sonification ou utilisation d’enzymes de restriction et des petits fragments d’ADN pontés (d’environ 200 à 500 paires de bases) sont obtenus.

-          On procède ensuite à l’immunoprécipitation de la chromatine pontée pour obtenir des complexes ADN/protéine purifiés grâce à un anticorps dirigé contre la protéine étudiée. Ceci permet de sélectionner les complexes du très grand nombre des autres fragments. Il est nécessaire d’avoir des anticorps d’une excellente qualité pour que la technique fonctionne correctement.

-          L’ADN précipité est ensuite purifié par chauffage pour annuler la réticulation par le formaldéhyde et l’ADN peut être séparé des protéines. Celles-ci sont digérées par la protéinase K. On obtient ainsi une collection de fragments d'ADN d'assez courte taille et dont on sait qu'ils interagissent avec une protéine d'intérêt (celle sélectionnée par l'anticorps).

Figure 1 : Mode opératoire de la méthode ChIP (Orlando, 1997)

-          On analyse ensuite l’ADN collecté grâce à une amplification par PCR et/ou à des puces à ADN en fonction de si la région du génome ciblé est connue.

 

4.  Intérêts et limites

 

L’avantage majeur de la méthode ChIP est qu’elle s’effectue in vivo, c’est-à-dire que l’information tirée de cette expérience provient directement d’une analyse faite sur les cellules vivantes et l’immunoprécipitation permet de récupérer les protéines voulues ainsi que toutes les régions d’ADN auxquelles elles étaient liées lors du pontage initial au formaldéhyde.

Cependant, malgré son succès la technique ChIP présente aussi des limites. Tout d’abord la résolution est limitée, on ne peut pas déduire la position précise du site de fixation de la protéine sur l’ADN, on identifie seulement une région de 200-300 pd dans laquelle se trouve le site de fixation ; on montre que la protéine se fixe en amont de tel gène mais sans que l’on sache où exactement. Une autre limite de la technique est que seules les protéines pour lesquelles on dispose d’anticorps peuvent être étudiées en ChIP. De plus les anticorps ont souvent le potentiel de réagir avec d'autres protéines nucléaires, malgré leur haute spécificité. 

 

5. Présentation des résultats

 

L’étape clé de la technique de ChIP est la caractérisation de la région précise de l’ADN génomique qui fixe la protéine d’intérêt. On retrouve deux méthodes de caractérisation. La première est la technique par PCR en utilisant pour amorces des oligonucléotides correspondant aux gènes d’intérêt. Elle permet un enrichissement en séquences d’ADN reconnues par la protéine. Ainsi, la présence ou l’absence de séquence amplifiée révèle si oui ou non la protéine d’intérêt était liée à cette séquence d’ADN dans les cellules à partir desquelles la chromatine traitée au formaldéhyde a été isolée. Cependant, cette technique ne peut être utilisée que pour identifier des fragments connus et vérifier leur présence ou leur absence. On peut aussi caractériser les fragments par la technique Slot Blot.

Figure 2 : Présentation des résultats de la méthode ChIP (Kuo et Allis, 1999)

 

Quand on veut déterminer où la protéine est liée sur un génome à grande échelle, on peut utiliser une puce à ADN (Chip on chip). Dans cette approche, l’ADN total isolé de la cellule et l’ADN lié avec la protéine sont marqués chacun avec un fluorophore différent (dans la suite on parlera du fluorophore rouge pour l’ADN lié et du vert pour l’ADN total). Les deux ADN marqués sont mélangés et mis à hybrider sur la puce à ADN. C’est une approche très puissante puisqu’elle permet d’examiner simultanément tous les sites potentiels d’un génome entier sans qu’aucune connaissance préalable des sites potentiels ne soit nécessaire.

 

6. Interprétation des résultats

 

 Dans le cas de l’analyse par PCR, si la protéine est fixée à la région de l’ADN attendue, alors l’ADN correspondant sera immunoprécipité lors de la ChIP et l’amplification sera possible. Deux contrôles importants sont nécessaires à ce stade.  Le premier est d’inclure aussi deux amorces qui ciblent une autre région de l’ADN sur la laquelle la protéine étudiée est connue pour ne pas se fixer (aucune amplification ne devrait être observée ; c’est un contrôle négatif). D’autre part, on effectue une PCR sur un échantillon qui n'a pas subi une immunoprécipitation par des anticorps avec des amorces spécifiques et non spécifiques. Si les amorces PCR amplifient de la même façon leur cible, alors on devrait obtenir une amplification à peu près identique dans les deux cas. Ce contrôle permet de s’assurer que cette différence est significative d’une différence d’abondance des matrices et pas d’une différence d’efficacité entre les deux PCR. Après amplification, l’ADN est analysé par Slot Blot ou par Southern Blot.

Dans le cas de l’analyse par puce à ADN, les zones de la puce à ADN qui ont un fort signal rouge sur vert correspondent aux séquences ayant fixé la protéine. Les zones de la puce à faible signal rouge sur vert sont les régions de l’ADN qui ne fixent pas la protéine étudiée.

 

7. Références bibliographiques

 

Carey, Michael F, Craig L Peterson, and Stephen T Smale. 2009. “Chromatin Immunoprecipitation (ChIP).” In Transcriptional Regulation in Eukaryotes: Concepts, Strategies, and Techniques, 2nd edition. Vol. 4. NY USA: CSHL Press.

“Chip on Chip — Wikipédia.” 2015. July 3. http://fr.wikipedia.org/wiki/Chip_on_chip.

Gilmour, David S, and John T Lis. 1985. “In Vivo Interactions of RNA Polymerase II with Genes of Drosophila Melanogaster,” Molecular and Cellular Biology, 5 (8): 2009–18.

Gilmour, David S, and John T Lis. 1986. “RNA Polymerase II Interacts with the Promoter Region of the Noninduced hsp7O Gene in Drosophila Melanogaster Cells,” Molecular and Cellular Biology, 6 (11): 3984–89.

“Immunoprécipitation — Wikipédia.” 2014. October 12. http://fr.wikipedia.org/wiki/Immunopr%C3%A9cipitation.

Kuo, Min-Hao, and C. David Allis. 1999. “In Vivo Cross-Linking and Immunoprecipitation for Studying Dynamic Protein:DNA Associations in a Chromatin Environment,” November, Methods 19 edition, sec. 425-433.

Locker, D. 2015. “‘ChIP on Chip’ Ou Comment Suivre La Technologie Des Gènes.” Accessed March 20. http://daniel.locker.perso.sfr.fr/article%20vulgarisation/CHIPonCHIP4.pdf 

Orlando, Valerio, Helen Strutt, and Renato Paro. 1997. “Analysis of Chromatin Structure by in Vivo Formaldehyde Cross-Linking,” METHODS: A Companion to Methods in Enzymology 11 edition.

Watson, James, Tania Baker, Stephen Bell, Alexander Gann, Michael Levine, and Richard Losick. 2009a. “L’approche ChIP-Chip: La Meilleure Pour Identifier Des Enhancers.” In Biologie Moléculaire Du Gène, 6e edition. Pearson Education France.

Watson, James, Tania Baker, Stephen Bell, Alexander Gann, Michael Levine, and Richard Losick. 2009b. “L’immuno-Précipitation E La Chromatine Permet de Détecter L’association Des Protéines Avec l’ADN Dans La Cellule.” In Biologie Moléculaire Du Gène, 6e edition. Pearson Education France.

 


CHROMATOGRAPHIE EN PHASE LIQUIDE ET SPECTROMETRIE DE MASSE (LC-MS)

par Alix GONAND, vendredi 17 mars 2023, 13:39
 


I) Objectifs

LC-MS, tirée de l’anglais Liquid Chromatography – Mass Spectrometry, est une technique de laboratoire de chimie analytique pour l'identification, la quantification et l'analyse de masse de nombreuses substances. Comme son nom l’indique, elle combine les performances de la chromatographie en phase liquide et de la spectrométrie de masse.

Ce couplage est aujourd’hui un des plus puissants utilisés par les chimistes et biochimistes en matière d’analyse qualitative (Arpino, 2009).

La technique LC/MS peut être utilisée dans l'industrie pour détecter les contaminants à l'état de traces, mais aussi en industrie cosmétique et pharmaceutique, pour détecter des impuretés. Sur le plan environnemental, la LC-MS est utilisée pour l'analyse de divers échantillons tels que le sol, l'eau potable ou les eaux usées, l'air et les boues (détection de pesticides, d’herbicides). L’utilisation se fait aussi dans le domaine biomédical pour identifier des protéines, des lipides….


II) Principe

Cette technique consiste en la succession de deux étapes :

  • Une chromatographie en phase liquide qui permet la séparation des différentes molécules d’un mélange.
  • Dans le spectromètre de masse, il y a formation d’ions, sans décomposition ni fragmentation des molécules, puis séparation des ions basé sur leur ratio masse/charge.


III) Mode opératoire

La LC-MS repose principalement sur l’utilisation d’un système de chromatographie liquide à haute performance (HPLC) et d’un système de spectrométrie de masse (MS).

Le système HPLC permet la séparation des différents composants d’un échantillon liquide. En utilisant une phase stationnaire hydrophobe et une phase mobile polaire, il y a migration différentielle dans la colonne de chromatographie. Les molécules arrivent tour à tour à travers un PDA (photodiode array = réseau de photo diode) où le temps de rétention du composé dans la colonne ainsi que son absorbance vont pouvoir être mesurés (obtention d’un Dt, lmax). Les molécules migrent ensuite vers le système MS.

Le système MS permet l’ionisation des molécules, par électrospray (ESI), ou par ionisation chimique à pression atmosphérique (APCI). Une fois rentrées dans le spectromètre de masse, les molécules chargées se dirigent ensuite dans un quadrupôle constitué de quatre tiges de charges, alternant rapidement entre charges positives et négatives. Cela induit des oscillations des ions. Seuls les ions qui n’heurtent pas les tiges de charges traversent le système et frappent le détecteur à l’extrémité du système. En fonction de la charge enregistrée par le quadrupôle à l’instant t de l’impact de la particule ionisée et des équations de mouvements, l’analyseur détermine le poids moléculaire (massenombre de charge=mz) du composé (Ying, 2022).

Figure 1 : Schéma du fonctionnement d’une LC-MS (Kailasam, 2022 d’après Cwszot, Dagui1929, Yassine Mrabet and Cas Ju reproduced under the Creative Commons CC0 1.0 Universal Public Domain Dedication license.)

Figure 2: Schéma d’un quadrupôle (Paul J. Gates, 2014, University of Bristol)


IV) Présentation des résultats

Une analyse LC-MS contient des informations sur le temps de rétention (RT) distinct pour chaque molécule, dans le chromatogramme, le rapport masse sur charge (m/z) dans le MS et l'abondance relative des ions pour chaque ion particulier. Les signaux MS détectés dans toute la gamme de séparation chromatographique sont formatés dans une carte tridimensionnelle, qui définit les données d'un seul passage LC-MS, comme le montre la Figure 3.

 

 

 

 

A.B.

Figure 3 : Analyse LC-MS à la sortie du MS. Fig3.A (Tsai et al, 2016), Fig 3.B (Zhou et al, 2012)


V) Interprétation des résultats 

L’aire sous le pic du spectre de rétention, permet de déterminer la concentration en analyte, par utilisation d’un pic de référence de l’isotope correspondant de concentration connue.

A partir de la position du pic issu du spectre de masse, la masse de l’ion moléculaire est déterminée par comparaison aux tables.

Lorsqu’un groupe de pics est observé sur le spectre de masse (m/z), cela correspond à un ensemble d’isotopes.

VI) Intérêts et limites

Avantages :

LC-MS est une technique de haute sensibilité qui permet l’analyse de composés polaires, apolaires, d’ions et de molécules thermolabiles. Cette analyse simultanée induit ainsi une réduction du temps et du coût de la réalisation.

De plus, selon ce que les chercheurs souhaitent montrer, par la diversité des colonnes à chromatographie, il est possible d’obtenir une séparation plus ou moins importantes des composés entre eux.

Elle permet également de déterminer la masse moléculaire d’analytes de taille inférieure à 1 000 Da à des analytes de taille supérieure à 100 000 Da.

Pour finir, en couplant les deux informations obtenues par la LC-MS (masse moléculaire et lmax), les chances d'identifier des mélanges complexes ainsi que des composés inconnus sont augmentées.

Limites :

L’appareillage de la LC-MS et l’analyse ultérieure des résultats peut être onéreux selon les revenus des laboratoires l’utilisant.

Il y a une variabilité importante des spectres obtenus en sortie de LC, ce qui pourrait gêner l’identification.

Les isomères ne peuvent pas être distingués. Leur masse est la même, mais pas leur structure.

Le spectromètre de masse est un détecteur destructif, il faut donc faire attention lors de la manipulation d'échantillons qui peuvent ne pas être facilement disponibles. Enfin, l'analyse d'échantillons instables par LC-MS peut s'avérer difficile (Kailasam, 2022).

VII) Références bibliographiques 

Arpino P (2009) Couplages chromatographiques avec la spectrométrie de masse. Techniques d’analyse. III (P1492). 1-24. doi: 10.51257/a-v1-p1492

Gates P (2014) Quadrupole Mass Analysis. UNIVERSITY OF BRISTOL. Consulté le 20 février 2023. http://www.chm.bris.ac.uk/ms/quadrupole.xhtml

Kailasam S (2022) LC-MS – What Is LC-MS, LC-MS Analysis and LC-MS/MS. Technology Networks. Analysis & Separations. Consulté le 28 février 2023. https://www.technologynetworks.com/analysis/articles/lc-ms-what-is-lc-ms-lc-ms-analysis-and-lc-msms-348238#D2

Tsai T-H, Wang M, Ressom HW (2016) Preprocessing and Analysis of LC-MS-Based Proteomic Data. In K Jung, ed, Statistical Analysis in Proteomics. Springer New York, New York, NY, pp 63–76

Ying Z (2022) Qu’est-ce que la LC-MS. ANTITECK. Consulté le 20 février 2023. https://antiteck.com/fr/qu%27est-ce-que-lc-ms/

Zhou B, Xiao JF, Tuli L, Ressom HW (2012) LC-MS-based metabolomics. Mol BioSyst 8: 470–481

Réalisé par : DUFRENE Marjorie, GONAND Alix, POIRIER-COUTANSAIS Auriane, 2023  

 

 

 

 

 

 



Chromosome Conformation Capture

par Lucie MULLIEZ, mardi 9 mai 2017, 13:34
 

Chromosome conformation capture (3C)

 

I) Objectifs

La Capture de Conformation Chromosomique (3C) est une technique décrite pour la première fois par Job Dekker et ses collègues en 2002, qui permet l’étude de la structure 3D de la chromatine. Elle fournit des informations sur la structure 3D et les interactions des chromosomes in vivo à une échelle de quelques dizaines à quelques centaines de paires de kilobases (Vernet, 2013).

Elle a pour but d’étudier l’organisation spatiale du génome, paramètre de contrôle de l’expression des gènes ainsi que sa dynamique au cours de différents processus biologiques tels que le cycle cellulaire, la mitose, la méiose…

 

II) Principe

Cette méthode permet la détection des interactions chromosomiques, c’est-à-dire des contacts physiques directs ou indirects (médiés par des complexes ribonucléoprotéiques) entre une séquence cible et un ensemble de séquences prédites ou connues pour interagir avec la cible. Elle est applicable sur des populations cellulaires de nombreux organismes, allant des bactéries à l’Homme.


III) Mode opératoire

La méthode 3C nécessite deux étapes principales: la génération de produits de ligation et leur détection (Fig.1).

Dans la première étape, les cellules sont fixées au formaldéhyde, les noyaux sont isolés, et les segments de chromatine spatialement proches sont réticulés de manière covalente au niveau d’un cross-link. Il peut s’agir de liaisons intra-chromosomiques ou inter-chromosomiques (Umlauf, 2015).

Les fragments de chromatine à analyser sont ensuite coupés par des enzymes de restriction spécifiques, et subissent une ligation de manière à rabouter ensemble les portions de chromatine reliées par le cross-link. Puis, les produits de ligation sont purifiés.

La deuxième étape consiste en une PCR (Hagège et al, 2007). Pour la méthode 3C, une vérification des interactions entre une séquence cible précise et des séquences prédites ou connues est réalisée. Grâce à cela, une PCR est conçue en choisissant les amorces spécifiques correspondantes (Gerosa, 2012).

Deux types de PCR sont utilisés : la PCR semi-quantitative qui se base sur une électrophorèse sur gel, ou la PCR quantitative en ayant recours à des amorces fluorescentes.

           


 

Figure 1: Étapes de la méthode Capture de Conformation Chromosomique (Moindrot, 2012).


IV) Présentation des résultats

L’analyse de la PCR repose sur l’étude de l’intensité des bandes des amplicons qui reflète directement l’abondance du produit de ligation, et donc la proximité des deux segments de chromatine dans le noyau ou le cytoplasme.


Figure 2 : Révélation de la PCR  (Dekker et al, 2002).

Pour s’assurer de la pertinence des résultats, un contrôle est réalisé dans lequel est construit un chromosome bactérien contenant les séquences d’ADN des produits de ligation supposés (Fig.2). L’amplification par PCR permet d’analyser les cross-links (Hagège et al, 2007). Cela permet de s’assurer que les signaux obtenus ne sont pas dus à des problèmes liés à la technique : non amplification d’un fragment lors de la PCR dû à un mauvais choix d’amorce, par exemple, ou à une trop faible quantité d’ADN introduite.

Sur ces graphiques, les interactions du fragment 6 (fragment cible) avec les fragments 5 et 13 sont étudiées.

Seul le produit de ligation associant les fragments 5 et 6 est amplifié, alors que ce fragment est amplifié dans le contrôle. Même si le traitement statistique n’est ici pas présent, il semblerait que ces fragments de chromatine 5 et 6 interagissent au sein du noyau contrairement à 6 et 13.

 

V) Interprétation des résultats

Les premiers résultats de l’utilisation de la méthode obtenus par l’équipe de Dekker sont présentés ci dessous :

 


Figure 3, 4 : Tableau des interactions de la chromatine (Dekker et al, 2002), Représentation 3D du chromosome III de S.cerevisiae (Dekker et al, 2002).


Le tableau (Fig.3) présente les distances, en nm, entre les différents segments de chromatine. La proximité des segments est illustrée par des cases de couleurs. L’intensité est d’autant plus élevée que les segments sont proches.

La diagonale descendante (de gauche à droite) montre que la distance des fragments successifs est faible : elle illustre le fait que plus deux segments sont proches en nombre de paires de bases sur le chromosome, plus elles sont proches spatialement. La diagonale ascendante révèle la proximité de fragments non successifs, mais qui sont proches spatialement : cela est interprété par la formation de boucles et repliements de la chromatine. La représentation 3D de la chromatine (Fig.4) permet une visualisation claire de la conformation de la chromatine. Il s’agit ici du chromosome III de la levure du boulanger Saccharomyces cerevisiae, obtenu en moyennant les conformations recueillies sur une population de levures.

 

VI) Intérêts et limites

L’avantage majeur de la méthode 3C est qu’elle récupère l’information de conformation de la chromatine in vivo, c’est-à-dire que les produits d’analyses obtenus proviennent directement des cellules vivantes.

De plus, elle assure l’obtention de cartes d’organisation spatiale de la chromatine. Elle renseigne ainsi sur les éventuels réarrangements du génome, sans avoir besoin de réaliser un fractionnement cellulaire ou de chromatine.

La préparation de l’expérience requiert néanmoins un travail laborieux et chronophage. Il s’agit de la partie critique de la procédure, puisque la résolution et la sensibilité de la technique dépendent en grande partie de sa conception expérimentale.

De nouvelles techniques basées sur la 3C ont émergé, chacune ayant des particularités et des applications différentes : La Capture de Conformation Chromosomique Circulaire (4C) est la suite de la méthode 3C. Elle permet de déterminer la nature des séquences en interaction avec une région chromosomique précise, sans présumer de leur identité alors que la méthode 3C consistait à vérifier des interactions prédites ou connues.

Enfin, la Capture de la Conformation Chromosomique en Copie de Carbone (5C), permet quant à elle, d’étudier le génome entier (Umlauf, 2015). Par ailleurs, il existe des variantes de la méthode 3C qui sont les méthodes 3C Hi-C et 3C ChiA-PET.

 

VII) Références bibliographiques

 

Job Dekker, Karsten Rippe, Martijn Dekker, Nancy Kleckner. (2002). Capturing chromosome conformation. Science. 295, 1306-11.


Rahel Gerosa. (2012). Chromosome Conformation Capture.

http://www.rna..uzh.ch/dam/jcr:ffffffff-b34e-2810-0000-0000308a3cc2/JC20121106.pdf

 

Hélène Hagège, Petra Klous, Caroline Braem, Erik Splinter, Job Dekker, Guy Cathala, Wouter de Laat & Thierry Forné. (2007). Quantitative analysis of chromosome conformation capture assays (3C-qPCR). Nature protocols. 2,1722 – 1733.

 

Benoît Moindrot. (2012). Organisation de la chromatine et son lien avec la réplication de l’ADN. https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00733254/document.

 

David Umlauf. (2015). Le génome intime…et en trois dimensions. Medecine Sciences. 31, 304-311.

 

Agnès Vernet. (2013). Dans l’intimité chromosomique d’une cellule. Biofutur.

http://www.biofutur.com/Dans-l-intimite-chromosomique-d-une-cellule.

 

 



CPG - CHROMATOGRAPHIE EN PHASE GAZEUSE

par Jean-Marc FRASLIN, mercredi 8 février 2017, 14:56
 

Chromatographie en Phase Gazeuse (CPG)

I)                  Objectifs

La chromatographie en phase gazeuse (CPG) a pour but, comme toutes les techniques de chromatographie, de séparer les différentes molécules composant un mélange. Cela permet de connaitre la composition de ce dernier. Elle est surtout utilisée pour des molécules gazeuses ou susceptibles d’être vaporisées par chauffage sans risque de décomposition.

II)              Principe

Le mélange à analyser est vaporisé et mélangé à un gaz porteur à l’entrée d’une colonne de longueur variable, faite d’un capillaire de différents matériaux (silice, acier…), et renfermant une phase stationnaire liquide ou solide. Le gaz porteur ne doit pas présenter d’affinité avec les matériaux constituant la colonne. Les molécules composant le mélange vont traverser la colonne à une vitesse dépendant de leur affinité pour la phase stationnaire. Une analyse est réalisée en sortie de colonne et permet donc de connaitre la composition du mélange.

III)          Mode opératoire

La première étape consiste à purifier le mélange à analyser1. Par exemple, dans le cas de l’analyse d’acides gras, ceux-ci sont trans-estérifiés sur du n-butanol.

Il est possible d’ajouter un étalon dans le mélange. Il s’agit d’une quantité précise et connue d’un composé qui n’est pas présent dans le mélange : Par exemple, dans le cas d’une analyse d’acides gras extraits de tissus animaux, il est possible d’ajouter un acide gras à nombre impair de carbones (qui est absent des échantillons, sauf exception). On parle alors d’étalon inerte1.

Une quantité d’échantillon allant de 0,2 à 5 µl est injectée dans une chambre en amont du capillaire : l’injecteur. L’injecteur est porté à la température de volatilité de l’échantillon (température légèrement supérieure à la température d’ébullition du mélange). Le mélange gazeux est alors injecté dans la colonne de chromatographie, où les différents composés seront séparés les uns des autres1

A la sortie de colonne, les composés entrent en contact avec le détecteur. Celui-ci évalue la quantité de chaque composé en fonction des modifications des propriétés physiques du mélange gazeux. Il convertit cette modification en un signal électrique envoyé vers un enregistreur. L’enregistreur était autrefois une imprimante qui dessinait directement les résultats sur papier. Il s’agit aujourd’hui d’un ordinateur, qui est en plus capable d’analyser ces derniers1.

Les principaux capteurs sont :

- le TCD (Thermal Conductivity Detector) qui fait appel à la différence de conductivité des composés. Il utilise pour cela un pont de Wheatstone, faisant varier la tension aux bornes d’un voltmètre en fonction de la conductivité du gaz1.

-le FID (Flame Ionization Detector) qui détecte l’ionisation créée par une flamme. L’ionisation modifiant la conductivité du gaz, celui-ci est soumis à une tension constante et l’intensité qui traverse ce gaz est mesurée.

-l’ECD (Electron-Capture Detector) qui détecte l’absorption électronique du gaz. Le gaz est soumis à un bombardement d’électrons et un détecteur capte ceux qui ne sont pas absorbés1.

-le MS (Mass Spectrometry) qui est basé sur la spectrométrie de masse1.

IV)           Présentation des résultats

Le chromatographe permet, dans un premier temps, l’obtention d’une courbe d’intensité du signal en fonction du temps. Cette courbe est appelée chromatogramme. La courbe présente des pics correspondant aux différents composés présents dans le mélange. Le temps auquel un pic apparait sur le chromatogramme est appelé temps de rétention.


Figure 1 : Exemple d’un chromatogramme obtenu pour un mélange d’acide gras issu de tissu animal. Il est à noter que l’étalon inerte est présent ici avec le C17:0.

La surface présente sous le pic d’un des composés du mélange est proportionnelle à la quantité de ce composé dans le mélange. Soit « à la main », soit par ordinateur (plus courant aujourd’hui), il est possible de calculer, par intégration, la surface de chaque pic et sa proportion dans le mélange1.

V)              Interprétation des résultats

La connaissance des temps de rétention permet de décrire qualitativement la présence de certains composés dans le mélange en fonction des pics du chromatogramme.

L’analyse du tableau d’intégration permet également de calculer la proportion des différents composés au sein d’un même échantillon. La proportion est égale à la surface du pic du composé d’intérêt divisée par la surface totale sous la courbe1.

L’utilisation d’un étalon permet également de calculer la quantité de chaque composé présent dans le mélange. Il est ainsi possible de comparer plusieurs échantillons entre eux1.

VI)           Intérêts et limites

La CPG s’adapte à l’analyse d’un mélange de différents composés. En cancérologie, elle est par exemple utilisée pour identifier des marqueurs de cancer de l’estomac2. En parfumerie, elle sert à dissocier les composants odoriférants d’un élément3. Elle peut également servir pour l’analyse de composés lipidiques, par exemple l’analyse des acides gras composant un tissu, ou celle de composés stéroïdes4. Enfin, elle permet de distinguer des acides aminés. Il s’agit d’un type d’analyse fine : des résultats peuvent être obtenus même si la molécule d’intérêt est présente en faible quantité (de l’ordre du pg pour les plus précis).

Cependant, tous les composés ne s’adaptent pas à cette méthode d’analyse. Comme ils doivent être chauffés, les molécules pouvant être dénaturées par la chaleur ne peuvent pas être utilisées. De plus, il faut qu’il n’y ait pas de réaction avec le solvant ou la colonne.

 

VII)       Références bibliographiques

1- Kamoun, P. (1997). Appareils et méthodes en biochimie & biologie moléculaire. Paris: Flammarion.Médecine-sciences.

 

2- Song H, Peng JS, Dong-Sheng Y, Yang ZL, Liu HL, Zeng YK, Shi XP, Lu BY. (2012). “Serum Metabolic Profiling of Human Gastric Cancer Based on Gas Chromatography/mass Spectrometry”. Brazilian Journal of Medical and Biological Research. 45 (1): 78–85.

 

3-Brattoli, M., Cisternino E., Dambruoso P., de Gennaro G., Giungato P., Mazzone A., Palmisani J., and Tutino M..(2013). “Gas Chromatography Analysis with Olfactometric Detection (GC-O) as a Useful Methodology for Chemical Characterization of Odorous Compounds.” Sensors. 13 (12): 16759–800.

 

4- McDonald, J.G., MatthewS., and AuchusR.J.(2011). “Steroid Profiling by Gas Chromatography–Mass Spectrometry and High Performance Liquid Chromatography–Mass Spectrometry for Adrenal Diseases.”Hormones and Cancer. 2 (6): 324–32.

 

 

 



CRISPR-Cas9

par Frederic JEHL, mercredi 23 mars 2016, 17:21
 

CRISPR associated protein 9 (Cas9)

 

I)                  Objectifs

CRISPR-Cas9 est une technique d’édition du génome développée par Emmanuelle Charpentier et Jennifer Doudna à partir de 2012 (4). Actuellement, ce système permet de supprimer une mutation voire un gène entier, d’insérer un nouveau gène dans un génome ou encore de créer des SNPs. Cette technique peut être utilisée pour faciliter un large panel d’applications en génie génétique, en particulier pour la manipulation ciblée du génome et les thérapies géniques.

 

II)              Principe

La méthode repose sur la capacité de certaines bactéries à résister aux virus grâce aux séquences CRISPR (Clustered Regularly Interspersed Palindromic Repeats), qui sont transcrites en des ARN contenant le complémentaire de l’ADN viral et qui se fixent à la nucléase Cas9. Lorsque ce complexe Cas9-ARN reconnait la séquence complémentaire dans la cellule, il le découpe. C’est cette capacité du complexe à identifier une séquence cible et à la lyser qui fait de CRISPR-Cas9 un outil d’édition précis du génome (3).

L’activité nucléase de la protéine Cas9, lui permet d’introduire des Double Stranded Breaks (DSBs), c’est-à-dire des cassures franches sur les deux brins de la molécule d’ADN. Lorsque ces cassures sont repérées par le système de réparation cellulaire, elles sont corrigées de deux manières différentes.

D’abord, le Non Homologous End Joining (NHEJ), mécanisme par lequel la cellule insère ou retire de manière aléatoire des nucléotides au niveau de la cassure pour permettre de rabouter les deux extrémités. Ce mécanisme est très imprécis, et tend à provoquer des mutations de type Insertion-Deletion (Indels).

L’autre possibilité est la réparation par Homology Directed Repair (HDR), mécanisme par lequel la cellule se base sur une matrice d’ADN de même séquence, qui peut être l’autre allèle du gène concerné, ou bien une matrice d’ADN fournie à la cellule, par exemple sous forme de single-stranded oligonucleotides (ssODNs). 

 

III)          Mode opératoire

La méthode consiste à fournir à la cellule, soit directement la protéine Cas9, soit sa séquence sous forme d’ADN plasmidique ou d’ARNm.

La protéine doit disposer d’un ARN guide (sgRNA), qui est une chimère artificielle entre le crRNA (pour CRISPR) et le tracrRNA (pour trans-activating), et qui lui sert notamment de modèle pour trouver la séquence d’intérêt sur l’ADN de la cellule-cible. Cet ARN peut lui être fourni séparément par transfection dans la cellule-cible, ou bien se trouver sur le même plasmide, sous contrôle d’un promoteur. Cas9 balaie ensuite le génome de la cellule-cible en ne s’arrêtant que lorsqu’elle rencontre un motif correspondant au PAM (Protospacer Adjacent Motif), dont la séquence canonique, présente toutes les 8 bases environ dans le génome humain, est 5’-NGG-3’. Si la séquence d’ADN en amont du PAM correspond à la séquence-cible, Cas9 réalise une cassure double brin entre le 3ième et le 4ième nucléotide en 5’ du 5’-NGG-3’.

De nombreuses versions modifiés de cas9 existent, avec une activité nucléase sur un seul brin (nickase), sans activité nucléase (dCas9), avec un PAM modifié (5’-YN-3’), se comportant comme un facteur de transcription, etc... (1, 5)

 

Illustration de la nucléase Cas9

Figure 1: Targeted genome editing with RNA-guided Cas9 (2)

 

IV)                  Présentation des résultats

La présentation varie selon le type de Cas9 utilisée et l’objectif de la manipulation. La mesure de l’activité d’une protéine fluorescente peut permettre de mesurer l’efficacité d’une transfection si l’on a transfecté une protéine-chimère, son ARNm ou bien un plasmide.

Pour démontrer l’efficacité de la modification d’une séquence cible, on peut réaliser un séquençage type Sanger de cette portion précise du génome. Pour s’assurer qu’aucune autre zone du génome n’a été modifié par erreur (off-target), on pourra soit rechercher les sites ayant une homologie forte avec la séquence cible et les séquencer également, soit faire appel à une méthode de séquençage haut-débit pour séquencer l’ensemble du génome.

 

V)              Interprétation des résultats

Dans un premier temps, la mesure d’une activité fluorescente, par exemple, dans la cellule-cible permet de valider la transfection de Cas9. Cela permet d’éliminer les cellules non-transfectées du champ d’étude. Enfin, le résultat d’un séquençage est analysé par alignement avec soit la séquence de départ, soit la séquence souhaitée. La conclusion de cet alignement est binaire : s’il est correct, la modification s’est réalisée avec succès. Dans le cas contraire, la technique n’a pas été efficace.

 

VI)          Intérêts et limites

Moins coûteuse et plus rapide que les autres techniques d’édition du génome, CRISPR-Cas9 a été testée sur des bactéries, des cellules végétales, animales et humaines. Le principal intérêt de cette méthode est qu’elle facilement déclinable car il “suffit” de changer la séquence guide du complexe pour l’adapter à une autre édition génomique.

Cependant, cette méthode n’est pas fiable à 100% car une séquence complémentaire de la séquence guide pourrait se trouver à un autre endroit du génome et il y aurait donc une mutation sur une autre séquence. Cependant, cette limite n’en est plus vraiment une car une alternative à Cas9 a été développée. En mutant un des deux domaines nucléases de Cas9, les chercheurs ont créé une “nickase” qui ne réalise plus qu’une seule coupure simple-brin. Avec une paire de nickases, chacun ayant une séquence guide correspondant à un des brins, la spécificité de la mutation est améliorée (6).

Enfin, des limites éthiques à cette méthode en pleine expansion commencent à apparaitre et doivent être discutées. En effet, la manipulation des cellules somatiques humaines devient plus accessible, avec des risques d’eugénisme en conséquence. De plus les mutations réalisées ne sont pas identifiables par un tiers contrairement aux techniques actuelles. Le caractère génétiquement modifié d’un organisme n’est donc plus vérifiable.

 

VII)           Références bibliographiques

1. Bolukbasi, M. F., Gupta, A. & Wolfe, S. A. (2015) Creating and evaluating accurate CRISPR-Cas9 scalpels for genomic surgery. Nature Methods 13, 41–50

 

2. Charpentier, E. & Doudna, J. A. (2013) Biotechnology: Rewriting a genome. Nature 495, 50–51

 

3. Hsu, P. D., Lander, E. S. & Zhang, F. (2014) Development and Applications of CRISPR-Cas9 for Genome Engineering. Cell 157, 1262–1278

 

4. Jinek, M., Chylinski, K., Fonfara, I., Hauer, M., Doudna J.A., Charpentier, E. (2012) A Programmable Dual-RNA-Guided DNA Endonuclease in Adaptive Bacterial Immunity. Science 337, 816–821

 

5. Perez-Pinera, P., Kocak, D. D., Vockley, C.M., Adler, A. F., Kabadi, A. M., Polstein, L. R., Thakore, P. I., Glass, K. A., Ousterout, D. G., Leong, K. W., Guilak, F., Crawford, G. E., Reddy, T. E, & Gersbach, C. A. (2013) RNA-guided gene activation by CRISPR-Cas9–based transcription factors. Nature Methods 10, 973–976

 

6. Ran, F.A., Hsu, P.D., Lin, C.-Y., Gootenberg, J.S., Konermann, S., Trevino, A.E., Scott, D.A., Inoue, A., Matoba, S., Zhang, Y., Zhang, F. (2013) Double Nicking by RNA-Guided CRISPR Cas9 for Enhanced Genome Editing Specificity.Cell 154, 1380–1389



CRISPR/Cas9 SAM

par Zoe WANTE, mercredi 25 mars 2020, 15:29
 

CRISPR/Cas9 SAM

 

• Objectifs

La méthode CRISPR/ Cas 9 SAM (Synergic Activation Mediator) permet l’activation de la transcription de gènes cibles (Dekeyzer et al., 2018). Cette surexpression a souvent pour objectif de reprogrammer des cellules (Wang et al., 2020), d’étudier la fonction d’un gène, ou encore d’identifier des facteurs de restriction antiviraux (Dekeyzer et al., 2018).


• Principe

Cet outil, dérivé du système CRISPR/Cas9 bactérien, cible la région promotrice d’un gène à l’aide d’un ARN guide et active triplement sa transcription, c’est-à-dire que l'activation de la transcription est permise par l'action synergique de trois protéines différentes (Dekeyzer et al., 2018).

 

Figure 1 : Le complexe activateur du système CRISPR/Cas9 SAM : il est composé de dCAS9 en rouge, des ARN aptamères en bleu et des divers activateurs de la transcription (VP64, MS2, p65 et HSF1 en vert) (Dekeyzer et al., 2018)

 

Le complexe utilisé est composé de trois éléments principaux : l’enzyme Cas9 désactivée, un ARN aptamère et une protéine de fusion. La protéine Cas9 (privée de son activité nucléase) ne brise plus les liaisons phosphodiesters entre nucléotides. Elle est fusionnée avec un activateur transcriptionnel (VP64). L’ARN guide possède une séquence complémentaire à la région du génome étudiée et permet l’association avec une protéine de fusion. En effet, cette protéine regroupe la séquence d’adressage de MS2 (protéine d’enveloppe du bactériophage MS2), ainsi que les domaines activateurs de transcription des protéines p65 et HSF1. Le domaine d’activation de MS2 reconnait l’ARN. Les actions coordonnées des protéines VP64, p65 et HSF1 entraînent une triple activation de la transcription du gène cible. L’ARN guide permet donc l’adressage du complexe au niveau du promoteur du gène étudié, et ainsi l’activation de la transcription de ce gène (Dekeyzer et al., 2018).


L’application de cette méthode se fait en plusieurs étapes. En effet, il faut fournir le complexe de protéines aux cellules à étudier. Pour cela, il faut construire, d’une part un plasmide contenant la séquence codant pour le (ou les) ARN(s) guide(s) (ou ARNsg), et d’autre part, un ou des plasmides contenant les séquences codant pour Cas9, VP64 et MS2 (Konermann et al., 2015).
Pour cela, l’ADN codant pour Cas9 est amplifié par PCR, en utilisant des amorces qui ajoutent un promoteur en 5’ et un signal de localisation à la fin de la séquence codant Cas9 (Maeder et al., 2013).
Une fois les plasmides construits, ils doivent être transfectés dans les cellules (par lipofection par exemple) (Maeder et al., 2013).


La présentation des résultats peut se faire de différentes manières, puisque cette technique possède de nombreuses applications. Ainsi, les résultats peuvent être présentés en réalisant une RT-PCR, en mesurant l’activité d’une enzyme, en réalisant un Western- blot, etc…

Prenons l’exemple de l’identification des facteurs de restriction antiviraux. Une des présentations possibles est la mesure de l’activité d’une protéine fluorescente. Le gène d’une protéine fluorescente est introduit dans des cellules. L’expression de ce gène est possible uniquement lorsque le virus est présent (des recombinases excisent alors un codon STOP du gène de la protéine fluorescente). Il est alors possible de visualiser les cellules infectées (fluorescentes) et donc de sélectionner les cellules non-infectées. Ces dernières ont acquis une résistance à l’infection en réponse à la surexpression d’un gène par CRISPR/Cas9 SAM (Heaton et al., 2017).



Figure 2 : Microscopie des cellules exprimant des ARNsg spécifiques de B4GALNT2. Les cellules fluorescentes sont les cellules infectées par le virus. Le pourcentage en blanc est le pourcentage d’infection par rapport au contrôle (Heaton et al., 2017).

 

Reprenons l’exemple précédent. Dans cette étude, la quantification de la fluorescence confirme que la surexpression du gène B4GALTN2 limite l’infection par le virus étudié, par rapport au témoin sans surexpression. CRISPR/Cas9 SAM a donc permis d’étudier le rôle d’un gène et d’identifier un facteur de restriction du virus étudié (Heaton et al., 2017).


Le système CRISPR/Cas9 SAM est très robuste et spécifique. Il permet l’activation de la transcription de nombreux gènes, quand il est associé à un pool conséquent d’ARNsg. Les intérêts principaux de cette méthode sont l’étude des gènes codant des protéines ou non, et l’étude de l’organisation du génome, et surtout de sa régulation (Konermann et al., 2015).

Malgré tous ces avantages, cette technique présente également des limites pratiques : CRISPR/ Cas9 SAM est un complexe très spécifique, la moindre mutation est un problème. Il faut donc être sûr de ce que l’on cherche ou bien posséder une multitude d’ARN guides. Ainsi, cette technique apparaît très intéressante in vitro, mais semble plus difficile à mettre en œuvre in vivo.

 

 



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