3. 4. 3 La détection : les méthodes classiques et rapides
Les microorganismes pathogènes peuvent se trouver en petit nombre dans l'aliment et sont souvent accompagnés d'un nombre beaucoup plus grand d'autres microorganismes éventuellement très proche phylogénétiquement. Dans ce cas, un enrichissement sélectif permettant la croissance favorisée des microorganismes recherchés est nécessaire (figure 160). Il peut être précédé d'un pré-enrichissement non sélectif : les colonies observées après culture en gélose ne représenteront donc pas le nombre de microorganismes présents au départ dans l'aliment. Par conséquent, on ne parlera pas de dénombrement mais de recherche ou détection et on conclura seulement à leur absence ou à leur présence (avec nécessité d'une confirmation). La recherche de ces microorganismes est généralement préconisée dans 25 g de produit.
Figure 160 : Principe de la méthode classique de détection
Les méthodes de détection classiques ou rapides reposent sur les différences qui peuvent exister entre les familles, genres et espèces bactériens. Ces différences, des plus grossières aux plus fines, correspondent aux critères morphologiques, biochimiques, immunologiques et génétiques.
Les critères classiques en microbiologie sont les critères morphologiques (taille, flagelle, forme des colonies) et biochimiques (type respiratoire, paroi, métabolisme). Il existe des kits qui économisent temps, espace et matériel pour effectuer une série de tests biochimiques d'identification (API). Les techniques rapides utilisent des critères génétiques ou immunologiques.
Ainsi, on recherche des technologies plus rapides et plus spécifiques pour chacune des étapes de l'analyse bactériologique classique. Une analyse classique peut être séparée en trois étapes :
- l'enrichissement,
- la détection
- la lecture (visualisation)
L'enrichissement (figure 161)
Cette étape permet d'isoler la bactérie de son milieu et de la remettre en conditions favorables afin de pouvoir la détecter. Elle consiste en une période de régénération dans un ou plusieurs milieux liquides, éventuellement sélectifs, et dure plus ou moins longtemps (au moins 24h).
Figure 161 : Principe de différentes méthodes rapides d'enrichissement avant détection
L'immunomagnétisme et l'immunoconcentration permettent de raccourcir considérablement cette étape. A l'aide d'anticorps, on peut enrichir et/ou extraire la bactérie recherchée. L'immunomagnétisme consiste à utiliser des anticorps fixés sur des billes magnétiques, ce qui permet de capter les bactéries à l'aide d'un aimant. L'immunoconcentration utilise des anticorps fixés sur un support que l'on pourra laver afin de ne garder qu'un « concentrat de bactéries ».
La détection (figure 162)
Figure 162 : Principe de différentes méthodes rapides de détection
On distingue différents types de détection :
- la détection immunologique : elle consiste à produire des anticorps spécifiques capables de se fixer aux antigènes des bactéries pour former le complexe antigène-anticorps. Ce complexe peut ensuite être visualisé.
- la détection par sondes nucléiques : ces sondes, produites en connaissance du génome de la bactérie recherchée, permettent de détecter la présence du gène dans la bactérie.
- la détection par PCR : en amplifiant l'ADN avant d'entamer la détection, on accroît sa sensibilité. Les copies sont ensuite confirmées par une technique de visualisation.
- la détection enzymatique : fondée sur la connaissance du système enzymatique des bactéries et de leur spécificité, elle permet de détecter la présence de cette bactérie en utilisant le substrat spécifique associé.
La visualisation (figure 163)
Cette dernière étape permet d'interpréter le résultat de la détection.
Figure 163 : Principe de différentes méthodes rapides de visualisation
Plusieurs méthodes sont possibles :
- La visualisation colorimétrique : en fixant un enzyme (phosphatase alcaline ou peroxydase) à des sondes ou à des anticorps spécifiques, puis en ajoutant le substrat correspondant, on peut provoquer un changement de couleur qui peut être détecté et quantifié par spectrophotométrie.
- La visualisation par fluorescence : elle repose sur l'ajout d'une molécule fluorescente (fluoresceine) fixée à la sonde nucléique ou à l'anticorps. Sous une lumière UV, on détecte la fluorescence.
Les techniques de biologie moléculaire ont un seuil de détection plus élevé que les techniques classiques de dénombrement ou d'isolement après culture en milieu gélosé. Les techniques immunologiques permettent de détecter les microorganismes si l'échantillon étudié en contient au minimum 104 ou 105.ml-1. Les techniques de PCR sont un peu plus sensibles puisque le seuil de détection est abaissé à 102 microorganismes.ml-1.
Ces techniques peuvent être utilisées lorsqu'on cherche à détecter les microorganismes après enrichissement (la solution d'enrichissement contient en général plus de 104 microorganismes.ml-1), mais ne conviennent pas lorsque l'on souhaite des limites de dénombrement proches de celles en milieu gélosé (10 microorganismes.g-1 ou 1 microorganisme.ml-1). Certains aliments contiennent des molécules inhibitrices de la PCR qu'il est difficile d'éliminer, et de plus comme nous l'avons vu précédemment, la méthode n'est pas spécifique des cellules vivantes.
Important
Le choix entre techniques de dénombrement et/ou de détection et entre méthodes classiques et rapides dépend donc de différents critères, qui sont synthétisés sur la figure 164.
Figure 164 : Choix des techniques classiques ou alternatives de dénombrement et de détection