4 Maitrise de la qualité des aliments

4. 1 La maîtrise de la Qualité

4. 1. 1 La réglementation

- Au départ : une réglementation nationale

Au début du XXème siècle, les pouvoirs publics s'intéressent à la protection de la santé et à la sécurité du consommateur, et promulguent la loi du 1er août 1905 sur la répression des fraudes et la falsification des produits agricoles et alimentaire. Ils créent l'organisme de contrôle associé, aujourd'hui la DDCCRF (Direction Départementales de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes). Cette loi constitue le fondement de la politique nationale de la protection du consommateur et débouche sur la création en 1993 d'un Code de la consommation qui fixe les obligations des opérateurs sous peine de voir leur responsabilité pénale engagée :

Le code de la consommation est complété pour les denrées d'origine animale par l'ensemble des obligations décrites dans le code rural, les agents des directions départementales des services vétérinaires (DDSV) étant chargés du contrôle de la qualité et de la salubrité de ces produits. Ces grandes orientations ont été approfondies par de nombreuses lois et normes réglementaires définissant des critères d'acceptabilité des denrées à respecter.

- Ensuite : La réglementation communautaire

La directive 93/43/CEE du 14 Juin 1993 «  Hygiène des denrées alimentaires  »

L'industriel est responsable de la qualité des produits qu'il met sur le marché et il doit définir les moyens à mettre en oeuvre pour « Préparer, transformer, fabriquer, conditionner, stocker, transporter, distribuer, manipuler et vendre les denrées alimentaires de manière hygiénique».

Cette directive instaure «   l'analyse des risques potentiels, (...) l'évaluation des risques et autres méthodes de gestion permettant d'identifier, de contrôler et de surveiller les points de contrôle critiques comme un moyen reconnu   ». Elle rend donc obligatoire l'identification de toutes les activités des entreprises agro-alimentaires à risque pour la sécurité des aliments et la mise en place de procédures de sécurité appropriées (FAO-OMS 1995). Les contrôles des services officiels intègreront non seulement une évaluation générale des risques, mais aussi les points critiques pour leur maîtrise déterminées par l'entreprise. Les services officiels sont donc à la fois contrôleurs de l'atteinte des objectifs réglementaires et évaluateurs des moyens mis en place par les professionnels.

Le règlement CE 178/2002

Le règlement CE 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établit les principes généraux et les prescriptions de la législation alimentaire,   il annonce clairement la mise en place de systèmes d'analyse et de maîtrise des risques. L'évaluation des risques, la gestion des risques et la communication sur les risques doivent constituer une méthodologie systématique pour déterminer les mesures efficaces, proportionnées et ciblées pour garantir la salubrité du produit.

Les outils

4. 1. 2 Les outils

Guide des bonnes pratiques (Arilait 1990)

Rédigés par les professionnels d'un secteur agro-alimentaire donnés (avec les autres partenaires d'une même filière et avec les consommateurs) puis validés par les pouvoirs publics et publiés au Journal officiel, les guides de bonnes pratiques d'hygiène ont pour but de décrire le procédé de fabrication d'un produit donné et de proposer des mesures permettant de limiter ce qui est qualifié de risques sanitaires. Ces recommandations permettent de diminuer la probabilité d'apparition de certains dangers en particulier ceux liés aux manipulations par l'homme et aux contaminations croisées. Les guides de bonnes pratiques prennent en compte la réglementation communautaire et nationale.

La méthode HACCP (Jouve 1991, Buchanam 1995, Bryan 1990)

Cette méthode vise à générer une attitude préventive face aux problèmes rencontrés par l'étude épidémiologique. Elle permet de hiérarchiser et d'orienter l'action à entreprendre pour améliorer la qualité sanitaire des produits. Elle correspond à une démarche rationnelle et systématique et est conduite selon un plan de travail logique dissociable en quatre phases :

  1. la formulaire du ou des besoins
  2. le recueil des données
  3. l'analyse des données
  4. l'action

L'HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point) ou « analyse des dangers - Maîtrise des points critiques » est une méthode permettant d'identifier et d'évaluer les dangers associés aux différents stades du processus de production d'une denrée alimentaire et de définir les moyens nécessaires à leur maîtrise. Un danger étant tout facteur biologique (microorganismes, toxines,...), chimique (additif, conservateur...) ou physique (température, corps étranger...) qui peut entraîner un risque inacceptable pour la santé et la sécurité du consommateur ou la qualité du produit. Un point critique étant tout point, opération ou procédure pour lequel la perte de la maîtrise peut entraîner un risque inacceptable pour la santé ou la sécurité microbiologique du produit.

Important

C'est donc une méthode structurée et progressive, pluridisciplinaire puisque tous les secteurs de l'entreprise sont concernés, participative (groupe de travail), responsabilisante, spécifique d'une entreprise, d'une chaîne de fabrication, d'un procédé, d'un produit.

C'est une méthode préventive car on va sélectionner des mesures opérationelles pour éviter les accidents et un constat par non analyse des produits finis. Mais c'est aussi une méthode critique, créatrice et évolutive car de nouvelles questions sont sans cesse posées, elle s'adapte a de nouveaux problèmes (ex : nouveau pathogène, nouvelle machine, nouveaux clients.)

La méthode HACCP est définie dans un planning comprenant 11 étapes.

Tableau 1 
n: Plan de travail HACCP

Etape

Objectifs

Sorties

1

Constituer l'équipe HACCP

Planning d'activité

2

Décrire le produit

Descriptif du produit

3

Identifier l'utilisation attendue

 

4

Décrire le procédé de fabrication

Diagramme de fabrication

5

Vérifier sur le site le diagramme de fabrication

Locaux, flux des produits

6

a) Analyser les dangers (identification et évaluation du risque)

b) Identifier et évaluer les mesures préventives

c) formaliser les mesures préventives

·Liste des dangers et mesures préventives

· Procédures opérationnelles

7

Identifier les CCP

Liste de CCP

8

Etablir pour chaque CCP des valeurs cibles et des tolérances

Critères de maîtrise et tolérance

9

a) Etablir pour chaque CCP un système de surveillance

b) Définir des actions correctives à mettre en oeuvre en cas de déviation

· Procédures opérationnelles

· Actions correctives, procédures

10

Définir des modalités de la vérification

Procédures opérationnelles

11

Etablir un système documentaire approprié

Documentation

Enregistrements

1- Constitution de l'équipe :

L'HACCP n'est pas réalisée par l'intermédiaire d'un responsable mais par la constitution d'une équipe formée à la démarche HACCP et comprenant , suivant l'organisation et la capacité de l'entreprise, les membres suivants :

L'équipe s'impliquera dans la mise en œuvre et la gestion de la démarche (transfert de responsabilité) ; elle a des relations fonctionnelles et non hiérarchiques.

L'équipe doit définir :

ex : flore pathogène et d'altération sur un rôti de porc frais

ex : améliorer la qualité hygiénique du produit

2- Description du produit

Le produit doit être décrit de manière très complète on pensera aux matières premières, aux ingrédients, à la formulation, à la composition, au volume, à la forme, à la structure, à la texture, aux caractéristiques physicochimiques (pH, aw, conservateurs), aux températures de stockage, de cuisson, de distribution, aux emballages...
 
3- Utilisation attendue

On décrira les modalités normales et raisonnablement attendues d'utilisation et aux instructions d'utilisation (DLC, mode et temps de cuisson...).

4- Description du procédé de fabrication

Il faut décrire le procédé de fabrication et le présenter sous forme d'un diagramme très détaillé : on trouvera notamment la nature du procédé, la fonction du procédé, les équipements, matériels, locaux, les caractéristiques (objectifs, paramètres, contraintes), les flux internes (matière, matériels, personnel), l'environnement.

5- Vérification du procédé de fabrication

Il faut vérifier le diagramme de fabrication sur le site et lors du fonctionnement de la chaîne de fabrication, afin de bien se rendre compte de la réalité au quotidien.

6- L'analyse des dangers

Conduire une analyse des dangers se décompose en trois parties importantes   : l'identification des dangers et des causes associées, l'évaluation du risque, l'établissement de mesures préventives. Il faut donc d'abord identifier tous les dangers (Ex : débris de verre dans le produit, présence de Salmonelles pathogènes). Pour chaque danger, il faut identifier toute situation, toute cause (matière première, ingrédient,   pratique, procédure...) susceptible d'introduire le danger considéré ou d'en permettre l'accroissement jusqu'à un niveau inacceptable,   et prévoir toutes les anomalies de fonctionnement, les opérations fautives...

Il faut ensuite évaluer le risque, c'est à dire évaluer la probabilité d'apparition du danger au niveau de chaque étape du procédé.

On peut évaluer le risque en tenant compte de trois points : la fréquence d'apparition de la cause, la gravité du danger associé à cette cause, et la probabilité de non-détection de la survenue de la cause. Une note peut être attribuée à chaque point de manière à hiérarchiser les dangers et par conséquent de s'attacher tout d'abord aux plus importants.

Il faut ensuite, devant chaque danger identifié, mettre en place des mesures préventives, c'est-à-dire des actions visant à éliminer le danger ou diminuer son risque d'apparition, par exemple changer un tunnel de refroidissement, modifier une procédure de nettoyage, murer une ouverture. Il faut formaliser ces mesures préventives. 

7- Identification des points critiques pour la maîtrise (CCPs)

Les points critiques pour la maîtrise (CCPs) sont des points, des étapes, des procédures où l'absence (la perte) de maîtrise entraîne un risque inacceptable. Les CCPs sont spécifiques d'une opération, d'un procédé ou d'un produit

Exemple

Ces CCPs peuvent être :

  • la matière première s'il n'existe aucun traitement permettant de réduire la contamination
  • la pasteurisation, la torréfaction, la cuisson, le séchage... La surgélation, la réfrigération...
  • le nettoyage-désinfection
  • la formulation, l'ajout de conservateurs...
  • la prévention de la contamination croisée
  • l'hygiène des employés et de l'environnement,...

et en général toutes étapes destinées à éliminer ou à réduire un danger, à empêcher le danger d'atteindre un niveau inacceptable ou les étapes où le danger considéré peut être introduit ou s'accroître sans qu'une étape ultérieure ne puisse l'éliminer ou le réduire.

L'utilisation d'un arbre de décision pour chaque matière première ou ingrédient et pour chaque étape du procédé peut permettre de déterminer les points critiques pour leur maîtrise.

Il faudra lister les CCP et les hiérarchiser.

8- Etablissement pour chaque CCP des valeurs cibles et des tolérances

Pour chaque CCP ont devra fixer des limites critiques qui sont des critères qui indiquent si une opération est maîtrisée pour un CCP particulier. Par rapport au danger microbiologique, les critères de maîtrise les plus fréquemment utilisés comprennent la température, le temps de séjour au froid, le pH, l'aw, la fréquence du nettoyage et désinfection...

9- Système de surveillance et actions correctives

Il s'agit de vérifier les exigences formulées pour le CCP. L'idéal est une surveillance en continu permettant d'avoir des informations en temps réel mais c'est souvent impossible. La surveillance est donc souvent discontinue : on doit donc définir le nombre, la fréquence des opérations de surveillance. Cela peut être des observations visuelles (nettoyage), des mesures physiques, ou chimiques ou des analyses microbiologiques. Cette surveillance doit être décrite par des procédures opérationnelles avec une définition des responsabilités. Les résultats doivent être enregistrés et être interprétés.

Il faut envisager et définir les actions correctives à entreprendre lorsque le système de surveillance révèle une perte de maîtrise d'un CCP afin de revenir à la maîtrise du CCP. Il faut prévoir aussi la gestion des produits affectés par la perte de maîtrise, la modification éventuelle des procédures de surveillance, la spécification de responsabilité, les enregistrements appropriés.

  10- Vérification

Il est impératif de prévoir une vérification de l'efficacité du système par exemple par l'analyse des déviations et des actions correctives, des analyses des réclamations clients, des essais de validation des valeurs fixées comme limites critiques (ex   : barème de pasteurisation). Les procédures de vérification doivent être décrites (modalité, périodicité, méthodes à mettre en oelig;uvre).

  11- Documentation de la démarche HACCP

Le besoin de preuves, pièces à conviction, est indispensable à la validation du système   HACCP, de plus sans élément contractuel fiable, il ne peut y avoir de base à la sécurité alimentaire. Un tableau de synthèse associé au diagramme de flux de fabrication permet de rassembler les éléments de l'analyse HACCP. Dans ce tableau, sera pris en compte la responsabilité de la   personne chargée de la surveillance et/ou de l'action corrective, puis de la vérification. A partir de ce tableau, des améliorations et/ou investissement trouvent tout naturellement leur place.

Important

L'HACCP est une méthode qu'il est possible d'utiliser pour mettre en oeuvre l'Assurance de la Qualité. Elle prend en compte les activités de l'entreprise pour prévenir un danger (ou un groupe de dangers) spécifié. Elle s'applique   à un produit, à un processus, à un projet particulier (danger = sécurité du consommateur).

Le système HACCP considère :

Le système HACCP est donc un ensemble de démarches raisonnées, structurées qui se succèdent dans un ordre logique pour atteindre un objectif défini. Si l'entreprise ne dispose pas de système d'Assurance de la Qualité, la démarche HACCP conduite en tant que telle sera une initiation à une démarche d'Assurance Qualité centrée sur un produit, un procédé, un danger particulier. Si l'entreprise à déjà mis en œuvre un système d'Assurance de la Qualité, la démarche HACCP sera adaptée à l'élaboration de plans Qualité spécifiques

Système d'assurance qualité

Certaines entreprises s'engagent dans une démarche d'assurance qualité qui dépassent le cadre de la maîtrise de la qualité qui, elle, ne concerne, comme nous l'avons vu, que les moyens opérationnels utilisés pour satisfaire aux exigences pour la qualité.

Exemple

En effet, l'assurance de la qualité vise à donner confiance en la satisfaction des exigences pour la qualité, à la fois au sein de l'entreprise et à l'extérieur vis-à-vis des clients et des autorités.

Le système d'Assurance de la qualité se base sur les normes de la série ISO 9000 (Normes ISO 9001 - 9002 -9003 = référentiels) qui bénéficient d'une large reconnaissance internationale et qui sont une véritable charte pour la gestion de la Qualité. Si la garantie de salubrité est obligatoire et réglementaire, la démarche d'assurance qualité est volontaire et joue un rôle déterminant dans le succès auprès des acheteurs et des consommateurs.